Il est 9 h 30 ce mardi matin, sur l’A1, non
loin du centre d’entretien de la Sanef de Roye. Il s’agit de l’un des sept
centres picards dans lesquels travaillent près de 275 agents chargés de
l’entretien et de la sécurité des autoroutes du territoire. André Molle, 45 ans
est au volant de son fourgon de patrouilleur, revêtu de son manteau jaune fluo.
Il a pris son poste à 5 heures du matin. Il fait partie des 45 agents qui
travaillent sur le site de Roye, chargés de surveiller une portion de
60 km sur l’A1 et 35 km sur l’A29. Son job ? « Je dois
sécuriser, protéger et informer », résume-t-il. Des objectifs qu’il
connaît bien, puisque cela fait 21 ans qu’il travaille pour la même entreprise.
Chaque jour, pendant huit heures, il couvre une distance de 60 km (aller et
retour). Il veille à ce qu’il n’y ait pas d’anomalie sur la route ou sur la
bande d’arrêt d’urgence.
Après avoir roulé pendant une dizaine de minutes, il
s’arrête sur le bord de la route. Il a repéré les morceaux d’un pneu éclaté,
éparpillés sur 200 mètres. « On peut ramasser de tout,
confie-t-il, même du mobilier, et des valises… Tout ce qui était mal arrimé
aux voitures » Il active sa signalisation lumineuse pour inciter les
usagers à ralentir et à ne pas se coller sur la bande d’urgence. En permanence
géolocalisé, il signale son intervention et prévient la radio 107.7 pour
qu’elle informe les usagers qu’il est de sortie : la procédure habituelle.
Sac-poubelle dans une main et ramasse déchet dans
l’autre, il sort de son véhicule. Pendant une dizaine de minutes il collecte un
à un les morceaux de caoutchouc. « Je regarde le plus souvent possible
derrière moi, ne serait-ce que pour déceler un comportement à risque,
explique-t-il, il faut anticiper le plus possible. Même si on ne peut pas
toujours prévoir la défaillance d’un conducteur ».
Tout comme plusieurs de ses collègues, il peut en
témoigner. En 2006, ce jour-là, il n’avait rien vu venir. Il a été fauché par
une voiture alors qu’il effectuait une opération de balisage. Le conducteur et
sa passagère sont décédés. Lui a survécu, mais a subi un traumatisme crânien et
plusieurs fractures. « L’accident c’était une chose, mais la période
qui a suivi a été très dure à vivre, se souvient-il. Même si je n’y
étais pour rien, je me sentais coupable. En plus, je ne savais pas si j’allais
pouvoir retravailler. » Aujourd’hui encore, son bras gauche garde des
séquelles. Malgré tout, après plusieurs mois de thérapie, il n’a pas hésité
lorsqu’il a su qu’il pouvait remettre le pied à l’étrier.
« C’est un beau métier, assure-t-il,
chaque jour on vient en aide à des gens différents ». Même si depuis
l’accident, il estime « peser davantage le danger par rapport à
l’importance des tâches à accomplir. » Père de deux enfants, comme
d’autres agents de la Sanef, il sait que sa famille est depuis ce jour, plus
soucieuse. « Ils ont eux aussi subi beaucoup », lâche-t-il.
Sa tournée se termine vers 13 heures. Après le pneu
déchiré, il a sécurisé la zone autour d’une automobiliste dont l’une des roues
avait crevé. Puis il s’est chargé de repositionner des plots orange,
certainement percutés par un véhicule, censés protéger une zone de travaux. Le
tout, en surveillant certains poids lourds et véhicules légers collés l’un
derrière l’autre.
« C’était une journée plutôt calme »
témoigne André Molle, de retour au centre de Roye. « Rien à voir avec
les chassés croisés du vendredi ». Que ce soit en début ou en fin de
semaine, André Molle et ses compagnons n’auront jamais le droit de baisser en
vigilance. Ce qui devrait aussi être le cas des automobilistes.
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