Unsa Autoroutes

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mardi 22 septembre 2020

Concession d’autoroutes : l’État s’est-il vraiment « fait avoir » ?

Pour un homme politique, la cause des autoroutes a tout pour plaire : c’est basiquement la défense du peuple, exploité aux péages, contre le grand capital, exploitant. Qu’en est-il vraiment ? 

Ce n’est pas la révolution attendue sur le sujet des autoroutes, mais l’effort est louable. Vendredi 18 septembre 2020, la commission d’enquête sénatoriale sur les autoroutes a finalement présenté son rapport.

Après huit mois d’auditions et d’investigations sur un sujet éminemment sensible dans l’opinion, le résultat ne va pas bouleverser le secteur. Mais il reste une question dont la réponse claire et nette se fait encore attendre : où situer au mieux l’intérêt de l’État et des Français ?

Les autoroutes toujours « trop chères » ?

À lire les motifs justifiant la création d’une commission d’enquête sénatoriale, l’impartialité des débats n’était pas partie pour être le maître mot : « augmentation régulière et importante des tarifs », « rente confortable », « dévoiement de certaines règles de concurrence »… Le décor était posé pour des règlements de comptes en bonne et due forme.

D’autant plus que des erreurs factuelles s’étaient déjà glissées dans le texte. On apprend ainsi qu’au « cours des dix dernières années, l’augmentation du prix des péages a été de 20 %, soit une hausse très largement supérieure à ce qui était prévu initialement ».

Ce qui était prévu initialement dans les prévisions de 2006, c’était une augmentation de 16 % ; non seulement 20 % n’est pas une « augmentation très largement supérieure », mais surtout ce chiffre est faux : sur la période 2009-2019, l’augmentation des tarifs des sept principales SCA (sociétés concessionnaires d’autoroute) a été de 13,9 %.

Sur la base de constats quelque peu éloignés de la réalité, les débats ont dû être houleux… On sentait d’ailleurs dès le début une certaine fébrilité parmi les membres de la commission : « Ça risque de cogner. On touche à un sujet sensible, faut pas se mentir… » témoignait ainsi Éric Bocquet, sénateur communiste, à l’ouverture des travaux.

Il est vrai que pour un homme politique, la cause des autoroutes a tout pour plaire : c’est basiquement la défense du peuple, exploité (aux péages), contre le grand capital, exploitant. Même si personne ne l’admet ouvertement, le dossier surfe de toute évidence sur un anticapitalisme français bien ancré.

Mais le moins que l’on puisse attendre d’une commission d’enquête sénatoriale, c’est qu’elle puise ses informations à bonne source. Or, des auditions aux divers rapports étudiés sur le sujet, la plupart des sources administratives et politiques a semblé instruire le même procès à charge : l’État se serait fait avoir, et avec lui, les usagers des autoroutes. Non seulement la réalité est plus complexe mais elle est surtout très différente.

Qui comprend vraiment le régime de la concession d’autoroutes ?

vendredi 18 septembre 2020

Autoroutes : un rapport du Sénat pointe la «rentabilité hors normes» de 40 milliards d’euros d’ici 2036

La commission d’enquête du Sénat sur les concessions d’autoroutes dénonce le manque à gagner de 7,8 milliards d’euros pour l’Etat lors des privatisations de 2006 et des « négociations opaques » en 2015, sous l’égide de Ségolène Royal et d’Emmanuel Macron. D’ici 2036, leur rentabilité va augmenter, avec 32 milliards d’euros rien que pour Vinci et Eiffage.

Les concessions autoroutières ont déjà fait couler beaucoup d’encre. On peut compter maintenant 300 pages de plus, celles du rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur les concessions autoroutières. Elle a présenté ce vendredi matin ses conclusions.

Décidée en janvier dernier à l’initiative du sénateur du groupe Union centriste, Vincent Delahaye, la commission d’enquête a auditionné les principaux acteurs de ce dossier sensible : Dominique de Villepin, Premier ministre lors de la privatisation polémique des autoroutes (voir ici son audition), tout comme ceux à l’origine du protocole d’accord, très favorable aux sociétés d’autoroutes, signé en 2015 : Ségolène Royal, Elisabeth Borne, qui était alors sa directrice de cabinet, Christian Eckert, ou encore Alexis Kohler, aujourd’hui secrétaire général de l’Elysée. Il n’en manque qu’un : Emmanuel Macron, ministre de l’Economie en 2015. Mais en tant que chef de l’Etat et en raison de la séparation des pouvoirs, il ne peut être auditionné par une commission d’enquête parlementaire.

Des autoroutes privatisées en 2006 pour 14,8 milliards d’euros

Le rapport, qui rassemble 38 propositions, revient évidemment sur la privatisation de 2006. L’ouverture du capital au privé avait en réalité déjà commencé avant. La privatisation de 2006 a rapporté à l’Etat 14,8 milliards d’euros, qui ont permis de réduire sa dette et de renforcer l’agence de financement des infrastructures. Un « processus de cession séquentiel » et « une absence de concurrence pour ASF », l’une des sociétés dont le capital a été ouvert sous le gouvernement Jospin, « qui a fait perdre à l’Etat quelque 6,5 milliards d’euros de recettes potentielles » dit le rapport, que Public Sénat a pu consulter. Précision de Vincent Delahaye : « Cela équivaut à 7,8 milliards d’euros aujourd’hui. Ce n’est pas rien » (voir la vidéo, images de Pierre-Henri Holderbaum). Si le processus est fait dans les règles, les autoroutes ont donc été concédées à un tarif pour le moins avantageux.

Lire la suite de l’article : ici

 

 

jeudi 10 septembre 2020

Routes nationales : un pas vers la privatisation ?

Un décret énonce désormais de quelle manière certaines sections de routes nationales pourront être classées dans la catégorie "autoroute"... et donc concédées.

 

Si l'on voulait être un peu caustique, on dirait que la date de publication du décret au Journal officiel, passé quasi inaperçu, n'a pas été choisie par hasard : en plein milieu du mois d'août, le 15. Le décret en question établit les conditions auxquelles des sections de routes nationales pourront passer dans la catégorie des autoroutes. Il précise, en fait, l'un des articles de la loi d'orientation des mobilités (LOM), promulguée le 24 décembre 2019.

Qu'explique-t-il concrètement ? Que des portions de routes gérées par l'Etat, avec un profil 2x2 voies et chaussées séparées, situées dans le prolongement d'une autoroute, peuvent être intégrées au réseau d'autoroutes et donc être potentiellement concédées. Certes, celles-ci ne concernent que plusieurs dizaines de kilomètres sur les quelque 12.000 km de routes nationales, mais à l'heure où la privatisation d'une majeure partie des autoroutes (9.184 km sur 11.600) suscite toujours la controverse, cet adossement de portions de routes à des concessions autoroutières pose question sur la future gestion du réseau national. Car l'un des objectifs de cet amendement vise "à sécuriser juridiquement l'adossement au réseau routier concédé de sections du réseau routier".

Lors de la proposition de la LOM, l'exemple cité était le prolongement de l'A51 à gabarit routier entre le péage de La Saulce et la vallée de l'Avance, qui pourrait désormais aller jusqu'à l'intersection de la RN94 et de la RD942. L'idée était de désengorger ce genre de tronçons, en échange de leur entretien par les concessions, à condition qu'ils soient “couverts par une augmentation des tarifs raisonnable”.

Une manne pour les concessions autoroutières 

Rémunération Annuelle Garantie (RAG) - Infos branche

Rémunération Annuelle Garantie (RAG)

La Rémunération Annuelle Garantie représente la somme brute annuelle en dessous de laquelle les salariés occupant des postes relevant de la même classe ne peuvent être rémunérés pour une année civile complète de travail (salaire de base brute sur l’année plus éventuel 13eme mois)

Tous les ans, les rémunérations les plus faibles dans toutes les classes d’emploi et sur l’ensemble des entreprises autoroutières sont donc étudiées et la négociation débouche, normalement, sur une revalorisation de la « rémunération plancher » selon divers critères (évolution du smic, inflation, …)

La vérification de ces montants de rémunération annuelle garantie se fait sur l’année civile précédente.

Et c’est là où le bât blesse pour l’Unsa car, cette année, la délégation patronale représentative de nos chères sociétés d’autoroutes a eu beau jeu de surfer sur la période « Covid » pour tenter de nous arracher des larmes sur leurs finances chancelantes et leur modèle économique maintenant fragile (snif).

Après une analyse sur la situation jugée catastrophique, et suite à une première proposition d’augmentation limitée à 0,9%, nos négociateurs ont finalement proposé un chiffre à 1,2% (à peine plus que l’inflation 2019) après un  simulacre de négociation à la « vous-nous-comprenez-on-ne-peut-pas-plus » agrémenté d’un mauvais scénario de suspension de séance et d’ « ultime proposition ».

Pour l’Unsa ce chiffre est inacceptable :

·         La situation de ce début 2020 n’a pas à être prise en compte pour des rémunérations 2019.

·         Le premier trimestre pré-crise Covid était excellent en termes de fréquentation autoroutière.

·         Les salariés visés par la RAG paieront plusieurs années : cette année avec la prise en compte de la baisse de trafic due au confinement, puis avec les baisses mathématiques des primes de participation et d’intéressement (pour le peu qu’ils y aient accès), et enfin l’année prochaine avec les RAG si l’ASFA suit le même raisonnement de retenue.

De plus, même si ces RAG sont (un peu) au-dessus du smic annuel, le taux horaire de ces salariés se situe en deçà de cette référence, le treizième mois n’ayant pas le but de « prime gratifiante» mais bel et bien de rattrapage de rémunération. L’Unsa milite depuis des années au sein de l’ASFA pour sortir ce 13eme mois de cette référence. Mais les sociétés d’autoroutes semblent se satisfaire de cette situation, certaines versant des compléments mensuels pour respecter le smic quand elles ne tentaient pas de se servir de primes pour respecter les montants des RAG. D’autres ont compris en augmentant artificiellement le salaire de base en y intégrant divers éléments : le salarié n’est pas payé plus mais la société se rachète une virginité grâce à cette manœuvre habile.

Cette obstination de maintien du 13eme mois dans la RAG et cette politique de retenue dans les augmentations contribuent à la paupérisation des salaires (surtout ceux dans les classes A,B et C) et à un tassement de ces rémunérations de base.

Cette situation semble complaire à certains, qui la dénonce annuellement le poing levé d’un côté mais l’accepte le stylo dégainé de l’autre.

Fidèle à ses principes et à ses déclarations en séance, l’Unsa ne sera pas complice de cet accord.

Il sera malheureusement signé, validé. Les discussions de l’année prochaine reprendront les mêmes arguments, et les mêmes protesteront mais les mêmes signeront.

La maitrise salariale a donc de beaux jours devant elle.