Non seulement la pandémie Covid n’a pas tellement altéré les résultats des sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA), mais il apparaît aussi de plus en plus franchement que le protocole d'accord négocié avec les autoroutiers en 2015 leur est ultra-favorable. Explications.
La publication en ce début d’année des résultats financiers des sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) des groupes Vinci (ASF, Cofiroute, Escota) et Eiffage (APRR, Area) – Sanef et SAPN (Abertis) ne les ayant pas encore présentés – montre que ces SCA s’en tirent plus que bien. Malgré deux confinements, avec une circulation routière quasi à l’arrêt durant le premier, et plus globalement l’impact du Covid sur l’économie, ce sont respectivement près d’1,35 milliard et 650 millions d’euros de dividendes que leurs actionnaires ont pu se partager l’an dernier, soit près de deux milliards d’euros en tout.
2020 ressemble peut-être pour beaucoup à « une année noire… mais pas pour les autoroutes ! », en conclut Vincent Delahaye, rapporteur de la dernière commission d’enquête au Sénat sur le sujet, et dont le rapport publié en septembre avait confirmé la rentabilité « hors normes » des SCA. Depuis, le sénateur (UDI) « ne lâche pas l’affaire », fait-il savoir lors d’une conférence de presse ce jeudi. Il a de nouveau mandaté Frédéric Fortin, l’expert indépendant qui avait fourni les projections financières à la commission, afin qu’il les réactualise.
Son verdict : si les dividendes finalement distribués sont inférieurs à ce qu’il avait prévu à un moment où l’on pouvait encore espérer que le plus gros de la crise Covid soit derrière nous, les chiffres d’affaires (6,7 Mds€) et les résultats nets (2Mds€), pour ce qui est toujours des SCA des groupes Vinci et Eiffage, sont supérieurs aux attentes. Et dans l’ensemble surtout, les grandes lignes qui s’étaient dégagées dans le rapport de septembre sont confirmées : le seuil de rentabilité prévue à la privatisation* des SCA en 2006 sera atteint bien avant la fin des contrats prévue entre 2033 et 2036.
Au lieu de l’estimer à 2022 pour ASF et 2021 pour APRR, soit avec 14 années d’avance, Frédéric Fortin, réactualisation faite, le prévoit plutôt pour 2023 dans les deux cas, ce qui ne change donc pas grand-chose à l’affaire. Ce sera « 13 ans avant la fin de la concession d’ASF », d'un côté, et « 12 ans avant la fin de la concession d’APRR », de l'autre… Preuve s’il en fallait qu’il existe dans ces contrats de concession un vrai déséquilibre financier, au détriment de l’État ! Et la dernière grande négociation à s’être tenue dans le domaine n’a rien arrangé ; elle l’a carrément aggravé.
Le beau cadeau de 2015 pour les autoroutiers