La lumière revient déjà, et le film est terminé
Je réveille mon voisin, il dort comme un nouveau-né
Je relève mon strapontin, j'ai une envie de bailler
C'était la dernière DP, c'était sa dernière séance
Et le rideau sur l'écran est tombé
Je réveille mon voisin, il dort comme un nouveau-né
Je relève mon strapontin, j'ai une envie de bailler
C'était la dernière DP, c'était sa dernière séance
Et le rideau sur l'écran est tombé
Voilà ! Fini les Délégués du Personnel, cette belle
instance représentative des salariés en France, créée officiellement en 1936
par le Front Populaire puis supprimée sous le régime de Vichy, rétablie par la
loi du 16 avril 1946 et dont l’origine remonte aux délégués à la sécurité des
ouvriers mineurs (loi du 8 juillet 1890) et aux délégués d'atelier dans
l'industrie de la défense nationale après 1917.
Une instance qui méritait le respect, bien plus qu’elle
n’en recevait lors des réunions.
Une instance dans laquelle ceux qui prenaient le rôle de
représentant du personnel à cœur se retrouvaient à prendre des coups, parfois
bien bas. Il fallait être accroché pour défier la Direction et aller au
casse-pipe pour les collègues. De belles engueulades, quelques rigolades, des
jeux d’acteurs, des représentants de la Direction qui découvraient les
problèmes de leurs salariés, des Directeurs qui s’endormaient, des
assistant(e)s juridiques buté(e)s qui ne comprenaient rien, qui tentaient de
nous apprendre le Code du Travail, des élus « plantes vertes » (ceux
que certains syndicats « maison » plaçaient pour vampiriser les
sièges d’élus et qui brillaient par leur absence) qui pouvaient postuler au
poste de vérificateur des néons plafonniers tant ils aimaient scruter le
plafond avec parfois un regard absent de toute forme de vie terrestre, des
cadres élus avec la bénédiction de la Direction et qui ne savaient pas si ils
devaient s’asseoir avec le peuple ou à côté du Seigneur Directeur, des élus
arrivistes qui ne comprenaient même pas leurs questions, ou qui ne savaient pas
les défendre quand leurs auteurs n’étaient pas là, ou qui plantaient même
carrément les salariés avec leurs questions.
Des dénonciations aussi, du temps des petites mafias…
caisses noires, ventes sans facture, accumulation de CDD à répétition sans
période de carence pour la famille d’un « bien placé » avec la
bénédiction de son chef et de la Direction, le trafic d’heures exceptionnelles
programmées, etc … tout ce qui nous a posé certains problèmes par la suite,
certains de nos élus ayant été visés par vengeance.
Bref, du beau spectacle avec tant d’anecdotes que l’on pourrait
en faire un livre.
Une belle instance dont le rôle des élus était de
réclamer et de revendiquer face à une Direction qui brillait par ses non-réponses,
une Direction dont la devise pouvait être « dites-moi ce dont vous avez
besoin, je vous expliquerai comment vous en passer…(Coluche)
On en a vu passer des Directeurs, toujours plus
intelligents et plus malins que les précédents, jusqu’à ce qu’ils soient à leur
tour remplacés par un qui les surpassait, et ainsi de suite.
Donc voilà, c’était la dernière séance. On a réveillé
notre voisin de la Direction qui dormait, la salle s’est vidée. L’instance des
Délégués du Personnel disparue un temps sous le régime de Vichy n’a pas survécu
à un énième assaut parlementaire qui, sous couvert de modernisation du dialogue
social en entreprise, en a profité pour la rayer définitivement de la
représentation du personnel, avec la bénédiction à peine voilée du patronat et
autres medef-compatibles.
l'Inf'Autonomes, l'information autonome du groupe Sanef du mois de décembre est à lire ou à télécharger ici : lien
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